Capitale administrative de la République du Congo, Pointe-Noire en est également le poumon économique avec notamment les activités de son port en eau profonde et de son terminal pétrolier. Elle doit aujourd’hui faire face aux menaces qui pèsent sur son littoral, sur ses zones naturelles, et sur les ressources halieutiques. M. Jean-François Kando, Député-Maire de Pointe-Noire, nous expose dans cet entretien qu’il nous a accordé les mesures qui permettront d’y répondre et de « Protéger la Biodiversité ».

La Ville de Pointe-Noire est membre de l’AIVP depuis 1995

AIVP – Un rapport récent publié par l’ONU – Habitat a identifié comme défi majeur la présence de déchets, d’hydrocarbures, de sacs plastiques, de bouteilles, le long des côtes de Pointe-Noire. Cette pollution marine est nuisible pour les espèces animales et végétales vivant sur le littoral.
Quelles politiques peuvent être mises en œuvre afin de lutter contre la pollution du littoral ?

M. Jean-François Kando, Député-Maire de Pointe-Noire Il convient de rechercher un financement pour la mise en place d’une chaine des valeurs d’assainissement et de gestion des déchets capable d’assurer la pré-collecte, le transport, le stockage, le tri, le traitement, le recyclage et la revalorisation des déchets sur le périmètre urbain en vue de :

⦁ lutter contre l’encombrement de la nature par les déchets ;
⦁ prévenir, préserver et renforcer par les capacités déjà existantes par la création des aires de transit des ordures ménagères ;
⦁ regrouper les opérateurs de pré-collecte dans les quartiers inaccessibles ;
⦁ concevoir et mettre en œuvre un nouveau schéma directeur des voiries pour le transport des déchets vers les décharges ;
⦁ acquérir une logistique moderne pour le désensablement, le curage des caniveaux et des cours d’eau ;
⦁ renforcer la législation en matière de répression ;
⦁ promouvoir l’éco tourisme.

AIVP – La bétonisation menace les mangroves de Mazra et de la Loya, d’après les études du « Centre National des Inventaires et d’Aménagement des Forêts ». Les mangroves constituent à la fois une zone de reproduction essentielle pour les poissons et crustacés, et un véritable « puit à carbone » absorbant le CO² présent dans l’atmosphère.
Comment protéger efficacement les mangroves face à l’expansion urbaine et/ou portuaire ?

M. Kando, Député-Maire de Pointe-Noire Nous avons pour objectifs de :
⦁ finaliser le plan directeur de la ville par la mise en œuvre du plan local d’urbanisme de manière urgente ;
⦁ recenser et protéger les mangroves existantes ;
⦁ restaurer les mangroves endommagées ;
⦁ créer une ceinture de sécurité des mangroves par l’expropriation des occupants du littoral ;
⦁ mettre en place une commission interministérielle : le Port, la Mairie, le Ministère de l’environnement dans le cadre du suivi des orientations définies.

© Renatura Congo

AIVP – L’ONG « Renatura Congo » est active dans le département de Pointe-Noire. Elle a organisé des sensibilisations en partenariat avec Congo Terminal, pour éduquer la population aux bons gestes à adopter en faveur de la biodiversité.
Votre municipalité pourrait-elle s’associer à cette initiative, ou lancer des actions dans la même direction ?

M. Jean-François Kando, Député-Maire de Pointe-Noire Oui, en raison des enjeux environnementaux, il sied d’associer et d’identifier d’autres partenaires pour la conception d’un vaste programme d’éducation de la population et de sensibilisation basée sur les principes de la préservation de l’environnement et de la vulgarisation des textes règlementaires.

© Renatura Congo
© Renatura Congo

AIVP – L’industrialisation de la pêche remet en cause la bonne gestion de la ressource halieutique. Un projet financé par l’Agence Française de Développement et la Commission européenne sur la période 2018-2023 a pour objectif d’améliorer la durabilité de la pêche sur le littoral congolais, et ainsi de protéger les espèces de poisson présentes localement.
Avez-vous, de votre côté, des projets liés à la pêche durable, ou pourriez-vous par exemple vous associer à l’initiative mentionnée ci-dessus ?

M. Jean-François Kando, Député-Maire de Pointe-Noire Non. Cependant, nous sommes disponibles pour nous associer à cette initiative dans le cadre de la préservation du littoral par les projets ci-après :
⦁ la reproduction des mangroves pour la reproduction des espèces aquatiques et pour lutter contre l’érosion marine ;
⦁ la construction des villages des pêcheurs ;
⦁ la construction d’une chaine de conditionnement et de vente des produits halieutiques ;
⦁ la création des groupements coopératifs de pêche ;
⦁ la modernisation de la pêche artisanale.

Redonner une place aux mangroves
506 hectares en 2000 – 57 hectares en 2014 pour les mangroves au Sud du Département de Pointe-Noire : selon les estimations du Centre National des Inventaires et d’Aménagement des Forêts (CNIAF) les mangroves auraient perdu 90% de leur superficie depuis les années 2000.
La nécessité de « Réhabiliter et protéger les mangroves dans un cadre participatif » est alors inscrite en 2016 dans le Schéma d’urbanisme de la Ville de Pointe-Noire. Un « plan d’action stratégique de restauration et d’utilisation durable des écosystèmes de mangroves et des zones humides associées » sur cinq ans est également établi par le Département de Pointe-Noire. Au niveau national le Congo s’est doté d’outils et de stratégies tels que l’inscription de certains sites sur la liste des zones humides d’importance internationale. Toutefois comme l’a souligné le 3 mars dernier 2021 la ministre du Tourisme et de l’Environnement, Madame Arlette Soudan-Nonault, lors de la Journée africaine de l’environnement, il faut poursuivre les efforts pour redonner une vraie place aux mangroves, dont les fonctions écologiques, biologiques, économiques et socioculturelles sont évidentes. Et selon la Ministre dans un pays fortement exposé aux enjeux du réchauffement climatique et de la montée des eaux « Prendre conscience de l’intérêt vital des mangroves pour la protection de notre littoral est donc, plus que jamais, un impératif ».

Renatura Congo et ses actions de sensibilisation
L’ONG Renatura Congo a été créée en 2005 pour répondre aux menaces pesant sur l’existence des tortues marines : pollution, braconnage, urbanisation, et activités économiques telles que la pêche. Elle s’engage plus globalement sur la sauvegarde de la biodiversité, notamment celles des mangroves que nous évoquons dans cet interview. Renatura Congo multiplie les actions de sensibilisation, en particulier en direction des enfants. 270 000 enfants ont ainsi été sensibilisés en partenariat avec les équipes pédagogiques des écoles publiques et privés de Pointe-Noire et des villages côtiers.
Renatura Congo

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