Montréal, métropole du Québec, figure parmi les plus importantes villes portuaires de l’Amérique du Nord, mais aussi de la francophonie. Avec son port océanique situé sur le majestueux fleuve Saint-Laurent, la relation entre la Ville et l’Administration portuaire locale est plus prometteuse que jamais alors que les représentants des deux institutions canadiennes étaient à Paris pour signer  l’Agenda 2030 de l’AIVP. Elles s’engagent ainsi à réaliser conjointement les objectifs de développement durable des Nations Unies en tant que ville et administration portuaires.

Grâce au comité de liaison qu’elles ont mis en place et aux échanges fréquents entre leurs équipes respectives, les deux entités collaborent déjà sur plusieurs sujets, tels que l’interface ville-port, la protection de la biodiversité, la mise en valeur de la culture maritime,  la cohabitation avec les communautés voisines et l’adaptation aux changements climatiques.

Mme Valérie Plante, mairesse de Montréal, et M. Martin Imbleau, PDG de l’APM Port de Montréal, nous font part de leurs ambitions communes Ville Port.

La Ville et l’Administration portuaire de Montréal sont respectivement adhérents de l’AIVP depuis 2022 et 1993.

Serge Lamontagne, Directeur Général de la Ville de Montréal, Bruno Delsalle, Directeur Général de l’AIVP, Valérie Plante, Mairesse de Montréal, Martin Imbleau, Président Directeur Général de l’Autorité portuaire de Montréal.
©André Cathy

Une vision commune pour l’avenir

AIVP – Les ports et les villes du monde entier sont en train de publier leurs visions de l’avenir. Ce sera un thème clé de la conférence de l’AIVP à Venise, en novembre 2023. La Ville et le Port de Montréal ont tous deux des visions stratégiques pour 2030. Pourriez-vous présenter ces visions et quelques-unes des stratégies conjointes mises en place pour les réaliser ?

M. Imbleau – À plusieurs égards, nos deux plans stratégiques se rejoignent et se rassemblent alors cela rend les choses beaucoup plus faciles entre nos deux organisations. Notamment lorsqu’il est question de relations citoyennes, de l’adaptation aux changements climatiques et de la réduction des GES. S’il en est ainsi, ce n’est pas le fruit du hasard. Parce que le plan stratégique du Port est le fruit d’une vaste démarche de consultation à laquelle de nombreux Montréalais ont participé. Ce plan, c’est leur plan parce que le Port de Montréal, c’est leur port !

Mme Plante – Montréal a une forte culture de la participation publique, notamment grâce aux mécanismes de participation citoyenne et de consultation publique que nous avons mis en place et qui inspirent de nombreuses organisations, comme le Port. C’est donc avec les Montréalaises et les Montréalais que nous avons construit le plan Montréal 2030, qui est le cadre structurant qui guide nos actions pendant cette décennie. On peut facilement imaginer un futur décarboné dans une métropole animée de quartiers à échelle humaine comme Montréal, parce c’est ce que veut la population montréalaise. Et évidemment, cela nous interpelle aussi dans notre relation entre la Ville et le Port, notamment lorsqu’il est question d’aménagement du territoire, parce que si le Port ne tient pas compte de l’opinion de ses voisins, cela va devenir de plus en plus difficile d’avoir un impact social positif.


©André Cathy

Une collaboration productive pour une ville portuaire durable

AIVP – Quelle importance accordez-vous à votre coopération dans la réalisation d’une ville portuaire durable et viable à l’horizon 2030 ?

Mme Plante – La collaboration, c’est vraiment dans l’ADN de Montréal. Si on est reconnu comme une ville créative, c’est notamment parce que tout le monde travaille ensemble. Bien entendu, les équipes de la Ville travaillent de plus en plus avec l’équipe du Port pour trouver des solutions aux défis d’aujourd’hui et de demain. La lutte et l’adaptation aux changements climatiques, la protection de la biodiversité, le développement d’une ville juste et équitable, c’est l’affaire de tous. Montréal est engagée à atteindre ces objectifs, mais je sais qu’on ne peut y arriver seul. C’est pour cette raison que nos collaborations, notamment avec le Port, sont aussi cruciales. Également, il faut rappeler que Montréal est la porte d’entrée en Amérique du Nord, surtout pour les Européens. Ce positionnement stratégique pour l’économie de notre métropole est possible grâce à de forts liens entre la Ville de Montréal et le Port. Et vous savez, en travaillant ensemble sur des grands thèmes, on développe toutes sortes d’autres collaborations porteuses.

M. Imbleau – Comme le dit l’adage : « Seul on va plus vite. Ensemble, on va plus loin ». Alors quand il est question de collaborations, nos portes sont toutes grandes ouvertes. Je dis souvent aux équipes qu’il faut accepter de se faire influencer, mais aussi il faut influencer les autres. Les projets pour améliorer l’interface ville-port qu’on va réaliser d’ici 2030 vont être meilleurs parce qu’on aura eu l’occasion de profiter de ces échanges qui peuvent nous apporter énormément. Qu’il s’agisse de développer des zones tampons ou encore des points d’observation pour redonner des percées visuelles vers le fleuve. On ne peut pas faire cela en vase clos !

Un dialogue ouvert est la clé d’une gouvernance renouvelée

AIVP- La gouvernance Ville Port renouvelée, qui est l’objectif 4 de l’Agenda AIVP 2030, sera aussi au centre des débats de notre conférence de Venise. Pourriez-vous présenter comment les citoyens et les parties prenantes sont impliqués à Montréal dans la construction de votre Vision 2030 ?

M. Imbleau – Sur l’aspect de la gouvernance, on a beaucoup appris au cours des dernières années. On a mis en place un comité de bon voisinage, on a ouvert la discussion au plus grand nombre avec notre plan stratégique et on a multiplié les occasions d’échanges avec nos voisins quand on a réalisé des projets. Mais on va devoir aller encore plus loin, car on ne veut pas juste être toléré, on veut être admiré. On veut que le Port de Montréal soit un symbole de fierté et cela on ne va pas pouvoir se faire sans une ouverture et un dialogue avec celles et ceux qui sont nos voisins. Cela représente une des valeurs du Port de Montréal. 

Mme Plante – Il se passe beaucoup de choses à Montréal et plusieurs portions du territoire qui étaient autrefois administrées par le Port vont bientôt faire l’objet d’une nouvelle vision de développement. Or, quand on développe un territoire aussi chargé d’histoire, on a le devoir de le faire en collaboration avec la population. Il faut donc multiplier les occasions qu’elle aura de s’exprimer, mais aussi le faire avec beaucoup d’ouverture. Ce dialogue continu, mais aussi cette volonté de donner la parole autant aux experts qu’aux citoyens, est la clé pour faire des projets de qualité. Cela demande du temps, mais c’est nécessaire, car les décisions qu’on va prendre aujourd’hui pour aménager les secteurs près du port auront de l’influence sur des dizaines et des dizaines d’années. C’est donc important de faire les choses de façon exemplaire. On souhaite également faire de Montréal une métropole de réconciliation avec les Peuples autochtones. On travaille avec l’ensemble des partenaires et on salue le leadership du Port Montréal, qui se joint au grand cercle d’engagement pour la pleine participation des Peuples autochtones à l’économie québécoise.

Un effort coordonné pour répondre à l’Agenda 2030

AIVP- Les deux entités ont collaboré à l’analyse de leurs actions individuelles et conjointes, actuelles et potentielles, pour atteindre les différents objectifs de l’Agenda 2030 de l’AIVP. Quels sont vos retours d’expériences de cet exercice et recommandez-vous à d’autres ports et villes de le faire ?

M. Imbleau – Mettre en commun nos projets et faire preuve de transparence, comme les gens de la Ville et nos équipes l’ont fait, ça amène des défis. Ç’a été l’occasion de constater que, même si nous avions des perspectives et, parfois, des priorités différentes, eh bien, nous avions beaucoup d’objectifs en commun. Ces atomes crochus sont des bases solides pour la suite parce que notre intention, ce n’est pas uniquement de regarder et de suivre les projets de chacun. Notre intention c’est de faire davantage de projets coordonnés et concertés, notamment pour améliorer l’interface entre la ville et le port.

Mme Plante – À plusieurs égards, les équipes ont constaté que le port est un peu une ville dans la ville. Alors, quand on a regardé les interventions de chacun, on a vite constaté que, de la gestion des eaux pluviales jusqu’à la plantation des arbres, il y avait plusieurs choses que l’on déployait déjà ensemble. Grâce aux commentaires de l’AIVP (et à l’Agenda 2030), on a aussi constaté qu’il y avait des éléments sur lesquels on devait davantage collaborer, comme l’arrimage avec le transport en commun et actif et la protection de la biodiversité. Montréal vient juste d’accueillir la COP 15 sur la biodiversité, et on vise à grandement accélérer nos efforts sur cette question. Alors autant le faire ensemble !

Une interface port-ville de qualité pour Montréal

AIVP- L’objectif 8 de notre Agenda 2030 qui porte sur l’interface Ville Port, est la raison d’être originelle de l’AIVP : quels sont les projets de la Ville et du Port pour valoriser cette zone et l’ouvrir au public ?

Mme Plante – À Montréal, les projets ne manquent pas ! Quand on regarde sur une carte, on se rend vite compte que les abords du port vont profiter d’un essor de développement unique dans l’histoire moderne de Montréal. Alors pour nous, améliorer l’interface entre la ville et le port est essentiel. On aspire à développer des quartiers à échelle humaine qui offrent une haute qualité de vie partout dans la métropole, et les quartiers aux abords du port ne font pas exception! D’un côté, les équipes accompagnent les promoteurs pour concevoir des habitations qui seront moins exposées aux bruits et aux autres nuisances qui viennent avec la nature des activités portuaires. Le Port s’assure, de son côté, d’informer adéquatement les architectes sur la réalité opérationnelle. C’est d’ailleurs l’un des éléments qu’on valorise beaucoup de l’AIVP. Beaucoup de villes à travers le monde ont réussi des projets de développement innovants aux abords de leur zone portuaire. En partageant nos expertises, on pourra apprendre des meilleures pratiques.  M. Imbleau – C’est certain que le développement des secteurs comme ceux de l’ancienne brasserie Molson, à quelques mètres de nos installations, représentent tout un défi, mais on s’est préparé en prévision de ce grand changement. Les équipes internes ont réalisé, en consultant la Ville, une étude complète sur l’interface ville port et on a une vision holistique de cette interface. Résultat, on a été en mesure d’identifier des projets porteurs, notamment une nouvelle bande verte qui va permettre de compléter, à terme, le réseau cyclable du centre-ville et de faciliter les accès vers le parc Jean-Drapeau. Cela ne va pas s’arrêter là, on vient justement de se commettre dans notre plan stratégique pour investir au moins 10 M$ pour des projets de ce type et on espère que tous les paliers de gouvernement vont embarquer dans cet effort.

Les priorités de Montréal pour 2025

AIVP- Pour conclure sur le court terme qu’elles sont aujourd’hui, pour le Port et la Ville de Montréal, les trois objectifs prioritaires de l’Agenda AIVP 2030 qui vont concentrer votre attention et vos efforts d’ici 2025 ?

Mme Plante et M. Imbleau – Tous les objectifs sont importants, mais certains d’entre eux sont particulièrement prioritaires pour Montréal. On pense notamment à la protection de la biodiversité (10), à la transition écologique et à l’économie durable (2), et à l’interface ville-port (8).

Serge Lamontagne, Directeur Général de la Ville de Montréal, Valérie Plante, Mairesse de Montréal, Stéphane Dion, Ambassadeur du Canada, Bruno Delsalle, Directeur Général de l’AIVP, Martin Imbleau, Président Directeur Général de l’Autorité portuaire de Montréal.
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Crédits photos : ©André Cathy

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