ALKÏOS est un écosystème d’entreprises au service du Vivant, dont la raison d’être est d’accompagner les organisations publiques ou privées, entreprises ou territoires, dans l’intégration des enjeux environnementaux en général et ceux liés à la biodiversité en particulier, dans la conception et mise en œuvre de leurs projets ou stratégies de développement. Les expertises mises en œuvre dans ces missions concernent la biodiversité (faune, flore, habitat, etc.), son monitoring par ADN environnemental, les sites et sols pollués (environnements terrestres et marins), les solutions fondées sur la nature et la résilience territoriale, par exemple. Elles permettent ainsi de proposer aux clients différents types de prestations : R&D, accompagnement en génie écologique, formation, conseil en stratégie et Responsabilité Sociétale des Entreprises et Organisations (RSE/RSO).

Interview avec Renaud Reynès, Directeur Prospective et Partenariats, ALKIOS.

ALKÏOS est membre de l’AIVP depuis 2022.

“En quelques mots”

Renaud Reynès, Directeur Prospective et Partenariats, ALKIOS.

AIVP – Vous venez de rejoindre l’AIVP. Pouvez-vous présenter brièvement aux autres membres de notre réseau international votre organisation ?

Crée en 2016, ALKÏOS est un écosystème constitué aujourd’hui de 8 entreprises aux compétences complémentaires, dont le cœur de métier est celui du Vivant et de la biodiversité.

Ainsi, nous comptons dans nos rangs les deux plus anciens bureaux d’études français et principaux acteurs du marché, spécialisés dans le volet faune et flore des études d’impact environnemental : Naturalia Environnement et Office du Génie Ecologique (OGE). La R&D étant dans notre ADN, sur la base de leur savoir-faire initial, nos équipes ont développé des expertises pointues visant à faire de la biodiversité un atout et non une contrainte, en accompagnant nos clients et partenaires dans une changement de paradigme et de pratiques sur ces sujets. C’est ainsi par exemple que la renaturation de sites, la résilience territoriale, ou les solutions fondées sur la nature sont venues compléter les services proposés à nos clients.

EKOS, bureau d’étude spécialisé dans l’ingénierie des sites et sols pollués vient compléter cette expertise lorsqu’il s’agit de caractériser une pollution de sols ou de sédiments, de préconiser puis de suivre un plan d’actions adapté en vue de leur dépollution pour un nouvel usage.

Pour nos clients qui souhaitent aller plus loin, EKORES et ALKÏOS FORMATION, accompagnent nos clients respectivement dans la structuration de leur démarche responsabilité sociétale des entreprises et organisations (RSE et RSO) et la montée en compétences par la formation, sur l’ensemble des sujets que regroupent nos expertises.

SPYGEN, notre partenaire pionnier de l’ADN environnemental (ADNe) à l’échelle internationale, propose une technologie révolutionnaire permettant de réaliser des inventaires de biodiversité en détectant l’ADN des espèces présentes dans l’environnement. Moins invasive et plus exhaustive, cette technologie s’avère aussi plus économique et plus rapide pour les inventaires en milieux aquatiques.

Enfin, notre savoir-faire ne connaissant pas de frontières, Antilles-Guyane-Environnement (AGE), propose l’ensemble de nos savoir-faire sur cette zone géographique, première pierre de notre développement dans les territoires français ultramarins et l’étranger.

© SPYGEN

Réconcilier les villes et les ports à travers des enjeux environnementaux

AIVP – Pourquoi avez-vous décidé de rejoindre l’AIVP et que pouvez-vous apporter à l’AIVP?

Les milieux naturels marins et à fortiori portuaires restent encore assez méconnus. Pourtant, la mer, les océans et les cours d’eau au sens large sont un immense réservoir de biodiversité. L’enjeu à leur égard est majeur qu’il s’agisse du stockage du carbone, de la conservation de biodiversité ou de l’adaptation aux changements climatiques.

Les ports sont en première lignes de ces enjeux, notamment celui liés au réchauffement climatique et à la montée des eaux qu’ils vont devoir affronter. Ils sont un maillon essentiel du développement de nos sociétés, souvent principale porte d’entrée et de sortie des échanges entre les territoires. Nos sociétés ont la mémoire courte et oublient aussi que les villes se sont bien souvent crées autour des ports, puisque c’est souvent ce premier ancrage territorial qui a permis la sédentarisation des peuples sur de nouveaux territoires et leur développement.

Paradoxalement, à l’heure où les ports sont souvent montrés du doigt, des études scientifiques montrent qu’ils jouent un rôle primordial pour la biodiversité marine car ils remplissent la fonction de refuge et de nurserie pour de très nombreuses espèces.

La démarche de l’AIVP, visant à « réconcilier » les villes avec leurs ports, au regard des enjeux environnementaux et sociaux, qui sont intimement liés, est dans la lignée de notre philosophie de travail qui vise à concilier les enjeux des acteurs du Vivant. Au travers de notre adhésion notre souhait est d’apporter aux membres de l’AIVP de nouveaux savoir-faire pour donner un éclairage nouveau à la relation port-biodiversité.

ADN environnemental – connaitre sa biodiversité

AIVP – Lors de votre intervention à notre 17ème conférence mondiale à Tanger, vous avez parlé du rôle des ports dans la conservation de la biodiversité. Comment pouvez-vous aider les ports à prendre les mesures essentielles pour protéger leur environnement immédiat ? 

Effectivement, lors de l’atelier où nous sommes intervenus, la question fondamentale posée par Mario Girard du Port de Québec qui animait nos échanges était double : « Dans un contexte portuaire urbain, protéger la biodiversité : comment améliorer nos pratiques pour mieux protéger ? Comment mieux mesurer ? ».

Notre réponse était alors résumée en une phrase : « On ne protège bien que ce que l’on connait ! ».

Connaitre la biodiversité du territoire que l’on gère est la première étape, qu’il s’agisse des espèces endémiques, pathogènes, ou exotiques envahissantes qui sont un enjeu majeur pour les ports.

Qui plus est, gérer un port sur le volet de la biodiversité est un exercice complexe faute de données : comment prioriser et décider des actions à mettre en œuvre ; comment en mesurer l’efficacité d’un plan d’actions ; comment en rendre compte à ses parties prenantes usagers, citoyens, riverains, concédants, bailleurs de fonds, autorités locale ou nationales, etc. ?

Il faut pour cela des indicateurs, c’est-à-dire des « outils d’évaluation et d’aide à la décision, élaborés à partir d’un élément mesurable ou appréciable permettant de considérer l’évolution d’un processus par rapport à une référence ». Or, s’il existe beaucoup de données sur la biodiversité, il n’existe pas d’indicateurs de biodiversité, faute de protocole scientifique à l’échelle internationale.

© SPYGEN

En cela nous apportons une solution aux gestionnaires de ports au travers de l’ADN environnemental (ADNe), technologie innovante développée depuis 2011 par SPYGEN. L’ADNe permet en effet aujourd’hui de disposer d’indicateurs de suivi des espèces qui soient à la fois scientifiques, fiables, comparables dans le temps et l’espace !

Le procédé est relativement simple même s’il cache des années de recherche et un savoir-faire complexe. Le principe est d’effectuer un simple prélèvement d’eau et de détecter les ADN des espèces présents dans cet échantillon. L’extraction, l’amplification et le séquençage des ADN collectés dans cet échantillon permet ainsi d’obtenir une liste d’ADNs qui, comparés avec nos bases de référence d’ADN, permettre de connaitre les espèces présentes dans le milieu échantillonné.

A contrario des méthodes traditionnelles d’inventaire, le procédé n’est pas invasif pour les espèces, il permet ainsi de s’affranchir des captures et de la pêche électrique. Il est ainsi plus sécurisé pour les opérateurs qui réalisent les échantillonnages et moins impactant sur l’exploitation d’un port. Reposant sur une technologie scientifique, il permet également d’éviter les biais liés à l’observation humaine, par nature imparfaite, ou aux conditions de turbidité des eaux et de rendre visible la biodiversité cachée, particulièrement abondante en milieu aquatique. Ce dernier élément est donc particulièrement important pour révéler toute la biodiversité portuaire.

Enfin, puisque le protocole appliqué est identique à chaque fois, les indicateurs de présence d’espèces qui en ressortent peuvent être comparés au fil des inventaires et constituer un véritable observatoire de la progression de présence des espèces au sein d’une installation portuaire. C’est un outil d’aide à la décision qui permet ainsi d’évaluer l’impact des mesures de génie écologique, la présence des espèces exotiques envahissantes ou même pathogènes. Mieux encore, il permet de comparer ses indicateurs avec ceux d’autres territoires utilisant le même procédé. Il est ainsi possible de comparer ses propres résultats avec ceux d’autres confrères d’échanger des retours d’expérience et de bonnes pratiques en matière de génie écologique et de conservation de la biodiversité.

C’est aussi un outil de reporting qui permet de rendre compte à ses parties prenantes, sur la base de données fiables, de l’engagement des ports en faveur de la biodiversité.

Enfin c’est un outil d’engagement citoyen et d’implication puisque nous développons des kits d’échantillonnage spécifiques aux sciences participatives et éducatives qui permettent d’associer un large public au travers de la participation aux prises d’échantillons : usagers, citoyens, scolaires, salariés, etc.

VIGILIFE

AIVP- Est-ce que vous pouvez expliquer votre programme VIGILIFE et comment les villes portuaires peuvent contribuer à ce programme ?

Avec d’autres organisations (entreprises, ONG, universités, etc.) ALKÏOS est membre fondateur de VIGILIFE, l’Observatoire mondial du Vivant. Cette initiative est née de la volonté commune des fondateurs de permettre une large diffusion à l’échelle du globe de la technologie de l’ADNe et de ses résultats.

En effet, face à l’érosion accélérée de la biodiversité aux quatre coins du monde, et partant du constat déjà évoqué qu’on ne protège bien que ce que l’on connait, il y a un véritable enjeu à généraliser les inventaires de biodiversité de façon exhaustive pour prendre les bonnes décisions de conservation. Il y a donc un enjeu d’urgence (donc de rapidité à obtenir des résultats), de qualité, fiabilité et interopérabilité des données récoltées et bien entendu de budget. Or les technologies traditionnelles d’inventaire ne permettent pas de répondre à ces enjeux. Seul l’utilisation de l’ADNe peut permettre la réalisation rapide, efficace et rapide d’inventaires massif à travers le monde pour obtenir et partager des données entre les gestionnaires de territoires.

VIGILIFE ambitionne donc de mettre en réseau l’ensemble des acteurs impliqués dans l’ADNe (collectivités territoriale, exploitants de sites, universités, bureaux d’études, laboratoire, ONG, etc.) afin de collecter des données et les partager avec le plus grand nombre en constituant ainsi un observatoire mondial du Vivant.

Ainsi aujourd’hui, la Colombie a rejoint VIGILIFE et bénéficie d’un transfert de technologie entre SPYGEN et l’institut de recherche public INVEMAR, avec la mise à disposition d’un laboratoire d’ADNe et d’autres projets sont en cours en Europe, en Afrique Subtropicale et dans l’Océan Indien.

Deux programmes thématiques d’observation sont déjà en place sur les fleuves sentinelles et les aires marines protégées.

© SPYGEN

Depuis quelques mois, nous notons un intérêt grandissant de la part des ports pour réaliser des inventaires de biodiversité en utilisant l’ADNe. Les motivations sont variées :

  • Réaliser un inventaire initial de la biodiversité et constituer un observatoire pérenne dans le temps ;
  • Détecter les espèces exotiques envahissantes ;
  • Disposer d’indicateurs pour mesurer l’efficacité un plan d’action de gestion environnementale et rendre compte à un concédant ;
  • Candidater à une labellisation environnementale exigeant un inventaire de biodiversité ;

Un programme « Ports sentinelles », de surveillance de la biodiversité par l’ADNe à l’échelle des ports et des villes portuaires serait donc une initiative très pertinente.

Il constituerait d’un véritable observatoire mondial de la biodiversité portuaire renforçant la visibilité du rôle de refuge et de nurserie des ports. Il favoriserait sur ces sujets la mise en réseau des acteurs, le partage d’informations, les retours d’expérience et de bonnes pratiques, etc. Il permettrait une véritable accélération de la connaissance des milieux naturels portuaires, la montée en compétence des équipes et en conséquence, une gestion environnementale plus efficiente.

Au travers d’une telle initiative, les villes portuaires et les ports en général et les membres de l’AIVP en particulier, pourraient apporter leur pierre à VIGILIFE et prendre part à cette alliance internationale en faveur du Vivant. Nous sommes là pour les y aider !